#107 – Comment traiter les patients sous anti-résorptif ?
Dans cette nouvelle “Réponse d’Expert”, nous abordons une situation clinique délicate : la réalisation d’un traitement endodontique chez les patients sous anti-résorptifs osseux. S’agit-il d’une contre-indication ? Quel est le niveau de risque réel ? Et surtout, quelles précautions doivent être mises en place ?
Le Pr Stéphane Simon nous propose une synthèse pragmatique et clinique pour nous aider à y voir plus clair.
LES ANTI-RÉSORPTIFS OSSEUX : UN CONTEXTE THÉRAPEUTIQUE PARTICULIER
Les anti-résorptifs sont utilisés dans le traitement de pathologies osseuses comme l’ostéoporose ou les métastases osseuses. Ils comprennent deux grandes classes :
les bisphosphonates (acide zolédronique, alendronate, pamidronate),
et le denosumab, un anticorps monoclonal (Prolia®, Xgeva®).
Leur mode d’action repose sur l’inhibition des ostéoclastes, réduisant la résorption osseuse. Bien qu’indispensables pour ces patients, ces médicaments peuvent provoquer une ostéonécrose des maxillaires, en particulier après un acte dentaire invasif comme une extraction.
POURQUOI L’ENDODONTIE EST CONCERNÉE
Elle se définit comme une exposition osseuse persistante au niveau des maxillaires, survenue après un acte dentaire ou de manière spontanée, chez un patient traité par anti-résorptif.
L’incidence est rare, mais la gravité et la chronicité de cette complication en font un enjeu clinique majeur.
QUELS SONT LES FACTEURS DE RISQUE ?
Le risque d’ostéonécrose dépend de plusieurs variables :
Le type d’anti-résorptif
Les bisphosphonates IV présentent un risque plus élevé que les formes orales.
Le denosumab, bien que sans accumulation osseuse, peut également être impliqué.
La durée du traitement
Un seuil critique est souvent observé au-delà de 3 ans de traitement.
L’état bucco-dentaire du patient
Les infections chroniques, les antécédents de chirurgie orale ou une hygiène déficiente augmentent le risque.
ENDODONTIE VS EXTRACTION : QUELLE STRATÉGIE CHOISIR ?
Le traitement endodontique représente une alternative thérapeutique privilégiée aux extractions, car il est moins traumatique pour l’os. Il permet, dans la majorité des cas, de conserver la dent et d’éviter une intervention à risque.
Cependant, des précautions strictes doivent être prises, notamment en cas de chirurgie endodontique.
LES PRÉCAUTIONS À METTRE EN PLACE
Évaluation clinique approfondie
Identifier le type de traitement, sa durée, les antécédents et l’état buccal du patient.
Ne pas hésiter à consulter le médecin traitant ou l’oncologue.
Adaptation de la stratégie thérapeutique
Privilégier les traitements conservateurs non chirurgicaux.
Réduire les traumatismes lors de l’accès canalaire.
Travailler sous microscope et éviter tout dépassement.
Désinfection rigoureuse du système canalaire
Mise en œuvre d’un protocole antiseptique renforcé.
Limiter les manipulations et les risques iatrogènes.
Suivi post-opératoire rapproché
Contrôles cliniques et radiographiques réguliers.
Surveillance des signes d’inflammation ou de complications.
CAS CLINIQUES : DEUX EXEMPLES CONTRASTÉS
Un patient de 65 ans, traité par acide zolédronique IV pour des métastases osseuses, présente une infection apicale sur une prémolaire. Après discussion avec l’oncologue, un traitement endodontique soigneusement planifié est réalisé : pas de complications après six mois de suivi.
À l’inverse, un autre patient sous bisphosphonates depuis 10 ans subit une extraction dentaire sans évaluation préalable : une ostéonécrose des mâchoires s’installe, soulignant l’importance des traitements conservateurs.
Conclusion
Un traitement endodontique n’est pas contre-indiqué chez les patients sous anti-résorptifs osseux, à condition d’adopter une approche prudente et personnalisée.
L’enjeu est de réduire le traumatisme osseux, désinfecter rigoureusement, et assurer un suivi rigoureux.
🦷 Une collaboration interdisciplinaire avec le médecin traitant ou l’oncologue est essentielle pour garantir la sécurité du patient.
Grâce à une évaluation complète et une technique méticuleuse, ces patients peuvent être traités en endodontie sans risque accru.
À très bientôt pour une nouvelle Réponse d’Expert !
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