La notion d’étanchéité en endodontie est bien une donnée acquise et qui ne fait plus débat. Pour autant, réalisez vous toujours une obturation coronaire juste après votre traitement canalaire ?
Ne reportez-vous jamais la restauration coronaire si vous avez un doute sur le pronostic du traitement que vous venez de réaliser ?
Le continuum corono radiculaire n’est pas qu’un simple concept mais bien une réalité très impliquée dans la notion de cicatrisation.
C’est ce sujet que je vous propose d’aborder pour cette nouvelle réponse d’expert d’Endo Académie.
Traitement canalaire et obturation coronaire sont encore trop souvent considérées comme deux étapes très distinctes, notamment dans leur réalisation. Il n’est pas rare, surtout chez les endodontistes de différer la restauration coronaire quelques jours voire plusieurs semaines après la séance d’endodontie.
Pourtant, le risque de réinfection du traitement canalaire, lors de la temporisation ou lors de l’empreinte pour une prothèse définitive est loin d’être négligeable.
Il est acquis depuis longtemps qu’une bonne restauration coronaire est au moins aussi importante qu’une bonne obturation canalaire. Refermer hermétiquement la porte d’entrée coronaire permet d’optimiser le pronostic d’une dent traitée endodontiquement. L’obtention d’une étanchéité de l’apex à la couronne est appelée le continuum endo-resto.
En 1995, une étude Ray et Trope en 1995 démontre que la qualité de l’étanchéité coronaire est au moins aussi importante que celle de l’étanchéité radiculaire pour optimiser l’efficacité d’un traitement. Depuis, plusieurs études ont confirmé ces résultats, et des méta-analyses ont permis de les compiler.
Elles montrent toutes qu’une restauration coronaire non satisfaisante était aussi préjudiciable qu’une obturation radiculaire déficiente. Et que les meilleurs résultats étaient obtenus avec une bonne restauration coronaire ET une bonne obturation radiculaire. La conclusion que l’on peut tirer est qu’enfermer hermétiquement les bactéries persistantes dans la dent, et empêcher l’arrivée de nouvelles bactéries est la clé pour la survie d’une dent traitée endodontiquement.
Les techniques et les matériaux récents ont changé le paradigme de la restauration post-endodontique qui consistait à poser systématiquement une couronne.
Si dans certains cas les recouvrements coronaires complets restent nécessaires, ils ne sont plus du tout systématique et encore moins obligatoires.
L’inlay-core est devenu largement évitable.
Les études récentes montrent d’ailleurs qu’un inlay-core métallique fragilise plus la dent qu’elle ne la renforce. La couronne aussi, en détruisant des zones stratégiques pour la résistance mécanique de la dent. Tous ces éléments sont scellés à la dent, puisque le métal ne peut pas coller au tissu
dentaire. Le scellement assure la rétention des pièces prothétiques mais en aucun cas ne créent de cohésion ni de renforcement intrinsèque comme peut le faire le collage.
Progressivement, le collage tend à s’imposer de plus en plus pour les restaurations coronaires.
De même les restaurations en composite tendent à supplanter les restaurations en céramiques. Une restauration collée corono-radiculaire en composite va permettre un plus grand respect du comportement biomécanique qu’un inlay-core, une moindre fragilisation et donc un risque de fracture très diminué. Une restauration coronaire collée présente donc une durée de vie de la dent sur l’arcade plus longue que celle restaurée par une couronne scellée.
Pour coller efficacement et durablement, il est indispensable d’avoir un tissu dentaire sec. La pose du champ opératoire est donc une prérequis qui ne se discute plus. La digue est à la fois nécessaire lors de la phase canalaire puisqu’elle prévient de tout risque de contamination ou de recontamination.
Pour la phase coronaire, elle est indispensable pour faciliter les procédures de collage qui doivent se réaliser à l’abri de la salive ?
Une fois la digue posée, et une zone de travail bien protégée des fluides biologiques, le traitement endodontique à proprement parler peut commencer.
A la fin, après l’obturation canalaire, la restauration corono-radiculaire ou coronaire peut être réalisée, toujours sous champ opératoire. Un sablage des surfaces dentaires augmente l’adhésion et donc la qualité du collage. Il faut utiliser un composite adapté, et adopter le protocole requis. Tous les composites ne s’y prêtent pas, on privilégiera des composites chargés qui ont de meilleures propriétés mécaniques. Les cavités issues de l’élimination de la
carie ou de restaurations préexistantes, la chambre pulpaire et la cavité d’accès seront reconstituées. En fonction de la restauration coronaire définitive choisie et de la perte de tissus, on réalisera ou non les points de contacts proximaux, et les faces occlusales. La restauration pré- endodontique pourra être conservée si cela est utile, et si le matériau utilisé est adapté.
Une fois la restauration post-endodontique terminée, il est même possible de préparer la dent pour réaliser une prothèse d’usage. On peut alors tailler dans la masse de composite pour obtenir la forme désirée, et prendre l’empreinte dans la foulée. On considérera la dent comme une dent vivante, puisque la cavité d’accès aura été reconstituée au composite, et que coller dessus est efficace et fiable.
On peut donc assurer une empreinte pour une restauration coronaire sans que la salive vienne réinfecter notre traitement endodontique. De bout en bout, l’asepsie de traitement a été assurée, et toutes les conditions requises pour optimiser le pronostic d’un traitement sont réunies.
Le temps nécessaire en plus n’est pas très important, puisque la zone est libre et dégagée, et tout se fait dans la foulée. En tout cas, ce protocole prend moins de temps que de revoir le patient pour une deuxième séance dite de « taille-empreinte ». A partir du moment où que la pose de la digue est maitrisée, le confort et l’ergonomie assurée paraissent indispensable, et le temps passé réduit à coup sûr.
En résumé, la fermeture hermétique des portes d’entrées canalaires et coronaires combinée à un traitement sous champ opératoire offre toutes les garanties pour optimiser l’efficacité de la prise en charge. Il serait dommage de gâcher les efforts d’un traitement endodontique par une erreur d’asepsie ou une restauration qui fragilisera la dent traitée. Ce continuum endo-resto doit donc être respecté et maintenu au maximum, pour un résultat qui satisfera le patient et nous-même. Voilà, la question mérite d’être approfondie, mais l’essentiel est là
A très bientôt
Il y a à ce jour sur le marché, suffisamment de produits disponibles pour éviter d’utiliser ceux qui contiennent de l’oxyde de Bismuth.
Donc oui, nous pouvons utiliser du Mineral Trioxyde Aggregate pour réaliser un coiffage pulpaire sur les dents antérieures, sans risque de voir apparaître des taches noires par transparence.
Il suffit de bien vérifier la composition des produits utilisés afin de vérifier la nature du radio-opacifiant contenu dans le produit.
L’apparition plus récente des fameuses biocéramiques qui ont également été rendues radio opaque par l’adjonction de radio opacifiant tels que l’oxyde de Zirconium, a laissé planer la croyance que seules les biocéramiques synthétiques pouvaient être utilisées pour le coiffage pulpaire.
En fait, il n’en est rien. Les MTA et autres ciments hydrauliques peuvent être utilisés sans risques, à condition, encore une fois, de s’affranchir de la présence d’oxyde de bismuth dans la composition du produit.
En conclusion, nous pouvons faire nos coiffages avec du MTA ou des biocéramiques non MTA sans risque, à condition de bien choisir son produit et d’en connaître sa composition.
A très bientôt
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