#106 – L’importance de l’étanchéité coronaire en endodontie
Dans cette nouvelle “Réponse d’Expert”, nous abordons un sujet essentiel en endodontie : la prescription du CBCT. Doit-on le prescrire systématiquement, rarement, ou selon des recommandations précises ? Nous nous appuyons ici sur les recommandations de la Société Européenne d’Endodontologie (ESE), publiées en 2019, afin de mieux comprendre son utilisation optimale.
Une étanchéité coronaire : un enjeu trop souvent sous-estimé
La réussite d’un traitement endodontique ne repose pas uniquement sur la qualité de l’obturation canalaire. L’étanchéité coronaire joue un rôle tout aussi déterminant dans le pronostic de nos patients. Mais jusqu’à quel point ? Et comment pouvons-nous l’optimiser pour garantir un traitement durable et efficace ? C’est ce que nous allons explorer dans cet article.
Qu'est-ce que l'étanchéité coronaire ?
L’étanchéité coronaire fait référence à la capacité d’une restauration à empêcher la micro-infiltration bactérienne et la pénétration des fluides salivaires dans le système canalaire traité. En d’autres termes, il s’agit de la barrière protectrice qui préserve notre obturation canalaire des agressions externes.
Sans une bonne étanchéité, l’environnement désinfecté obtenu lors du traitement endodontique peut être compromis. Les bactéries peuvent recoloniser le système canalaire, augmentant ainsi le risque d’échec du traitement et de complications ultérieures.
Preuves scientifiques : l'étanchéité coronaire prime-t-elle sur l'obturation canalaire ?
Plusieurs études ont mis en évidence l’impact crucial de l’étanchéité coronaire sur le succès des traitements endodontiques. Ray et Trope (1995), dans une étude rétrospective publiée dans le Journal of Endodontics, ont évalué plus de 1000 dents traitées endodontiquement et ont conclu que la qualité de la restauration coronaire avait un impact plus significatif que celle de l’obturation canalaire.
Des conclusions similaires ont été confirmées par l’étude de Gillen (2011), qui a démontré que la combinaison d’une obturation canalaire de bonne qualité et d’une restauration coronaire étanche offrait le meilleur pronostic. Négliger l’un ou l’autre de ces aspects compromet sérieusement les chances de succès du traitement.
Comment assurer une étanchéité coronaire optimale ?
1. Choix des matériaux de restauration
Le choix des matériaux est crucial pour garantir une étanchéité durable. Les matériaux adhésifs, tels que les composites et les ciments verre ionomère, offrent une meilleure étanchéité que les matériaux non adhérents.
Il a été démontré que les restaurations provisoires à base de ciment oxyde de zinc-eugénol présentaient une micro-infiltration significative après quelques semaines (Swanson et Madison, 1997). Il est donc recommandé d’utiliser des matériaux provisoires de haute qualité, comme le Cavit ou un ciment verre ionomère, et de réaliser les restaurations définitives dans les plus brefs délais.
2. Respect des protocoles d’adhésion
L’amélioration des techniques de collage a grandement renforcé l’étanchéité coronaire. Une étude en 2012 a montré que les systèmes adhésifs auto-mordançants pouvaient offrir une étanchéité comparable aux systèmes avec mordancage si appliqués correctement. Le respect strict des protocoles d’adhésion est donc essentiel pour prévenir les défauts de collage et assurer une restauration pérenne.
3. Protection de la cavité d’accès
Pendant les phases intermédiaires du traitement, la cavité d’accès doit être protégée de toute contamination salivaire. L’utilisation d’une digue est indispensable pour éviter toute infiltration. Une étude de Saunders et Saunders (1990) a montré que l’exposition du système canalaire à la salive pendant plus de trois jours pouvait entraîner une recolonisation bactérienne complète.
4. Adaptation de la restauration coronaire
Enfin, la restauration coronaire doit être bien adaptée au niveau occlusal. Des micro-mouvements liés à une mauvaise adaptation peuvent affecter l’étanchéité et fragiliser la restauration.
Cas cliniques : l'impact de l'étanchéité coronaire sur le succès du traitement
Prenons l’exemple d’un patient traité pour une lésion apicale sur une molaire mandibulaire. Après un traitement canalaire rigoureux, une restauration provisoire en ciment verre ionomère a été placée. Cependant, le patient n’est revenu pour la restauration définitive que six mois plus tard. Une radiographie a alors révélé la persistance de la lésion, soulignant l’importance de réaliser une restauration coronaire étanche dans les meilleurs délais.
En revanche, un autre patient, traité avec une obturation canalaire de qualité moyenne mais protégé par une couronne céramo-métallique bien adaptée, a présenté une guérison complète de la lésion.
Conclusion
L’étanchéité coronaire est un élément clé du succès des traitements endodontiques, souvent sous-estimé par rapport à l’obturation canalaire elle-même.
En tant que praticiens, nous devons accorder autant d’attention à la restauration coronaire qu’au traitement canalaire. Cela passe par le choix des bons matériaux, le respect strict des protocoles d’adhésion et la sensibilisation des patients à l’importance d’une restauration définitive rapide, idéalement sous 30 jours.
Nous vous invitons à approfondir le sujet en consultant les études scientifiques disponibles sur notre site. À très bientôt pour une nouvelle réponse d’experts !
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