L’ibuprofène a une mauvaise presse dans le milieu médical. Qualifiée de « médicament du dentiste », souvent avec un air légèrement dédaigneux, il nous est parfois reproché d’utiliser cette molécule à mauvais escient et surtout sans savoir pourquoi.
Et bien c’est tout le contraire. L’ibuprofène est, dans tous les consensus de la communauté endodontique, considérée comme la molécule de choix pour la gestion des douleurs post opératoires, en endodontie.
La famille à laquelle appartient cette molécule a une dénomination très explicite mais trompeuse. Dans la notion « Anti Inflammatoire », il faut comprendre que la molécule agit sur le processus de l’inflammation sans pour autant avoir pour objectif de le stopper.
En tant qu’anti cyclo-oxygénase non sélectif, l’ibuprofène bloque la production de prostaglandines, précurseurs des interleukines, à partir de l’acide arachidonique. En bloquant ce processus, il agit directement sur la composante algique de l’inflammation.
En endodontie, l’inflammation est la composante majeure des pathologies impliquées dans la douleur. C’est la raison pour laquelle, l’ibuprofène est particulièrement intéressante pour les endodontistes.
Comme pour tout, aucune étude ne permet de démontrer clairement que l’ibuprofène présente des effets supérieurs en tant qu’antalgique dans le cas de douleur d’origine endodontique. Néanmoins quelques études l’ont comparé au Paracétamol et ont montré sa supériorité, dans le cas des suites post opératoires après extraction de la dent de sagesse et de l’épisiotomie ( ces deux interventions sont les modèles utilisés par les spécialistes de la douleur pour évaluer l’efficacité d’une molécule).
Les limites imposées dans la prescription sont variables selon les pays. Limitées à 1,2g/ jour en France, les limites sont étendues à 3,6g/jour dans les pays anglo-saxons. Ces limites françaises nous empêchent d’appliquer les protocoles proposées par les consensus internationaux qui proposent la prescription de fortes doses d’ibuprofène avant de passer aux molécules de classe II pour la prise en charge des douleurs fortes.
Cette limite nous contraint surtout pour la gestion de cinétique de prescription.
En effet, en cas de forte douleur la période de 6h entre deux prises est problématique. Il est donc proposé d’alterner les prises d’ibuprofène avec 1g de Paracétamol permettant ainsi une absorption médicamenteuse toute les 4 heures pour une meilleure gestion de la douleur.
Bien que très attractif présenté comme cela, n’oublions pas que l’ibuprofène est un médicament avec tous les inconvénients et effets indésirables associés que l’on peut en attendre. Une prescription n’est jamais anodine et une erreur peut avoir des conséquences importantes. L’ibuprofène comme l’ensemble des AINS présente de nombreuses interactions médicamenteuses et de contre-indications.
L’accès en vente libre en pharmacie de cette molécule a largement contribué au développement de l’auto-médication. Et en cas de douleur, il est difficile de contrôler de façon raisonnable ses prises de médicaments. Ainsi, il conviendra de toujours s’informer auprès du patient des doses qu’il a déjà assimilées au cours des derniers jours avant sa consultation avant de se précipiter sur l’ordonancier.
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